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19/07/2007

Alexandries d'été

De 23h à 1h du matin retentit une musique folklorique, tous les soirs les mêmes refrains à fond, qui emplissent tous les immeubles des alentours… Pas moyen d’y échapper, le théâtre est situé juste de l’autre côté de la rue, et durant le spectacle quotidien je n’ai d’autre choix que de subir sa musique. Inutile de lutter et de tenter de la couvrir par ma propre musique, je ne gagnerai pas, le volume est trop fort, et la température impose de laisser les fenêtres ouvertes pour ne pas étouffer dans la chaleur intérieure accumulée dans la journée et faire quelque peu entrer la fraîcheur du soir.
Pas de doute, c’est l’été alexandrin et ses théâtres en plein air de la corniche qui ont rouvert comme chaque année pour amuser les soirées de l’estivant cairote. Ce dernier vient passer ses quelques semaines de congé payé au bord de la mer et profiter de la légendaire brise alexandrine qui fait que les étés et surtout les soirs d’été y sont beaucoup moins étouffants que dans la vallée du Nil, malgré la chaleur humide qui pèse tout de même sur la ville la journée.

Toutes les stations balnéaires, c’est bien connu, se transforment pendant l’été, doublant de population et se dédiant alors entièrement à cette activité touristique. Mais Alexandrie n’est pas une station balnéaire, c’est une mégapole d’environ quatre millions d’habitants (encore qu’on ne sait pas trop les compter…), la deuxième ville d’Egypte. Or elle a la particularité de s’étendre sur 20 kilomètres de côte méditerranéenne, 20 kilomètres de plage en pleine ville à proximité des hôtels et appartements loués saisonnièrement.
Alors pendant cette période, le centre-ville et les rues commerçantes se remplissent d’une foule bruyante et colorée toute la soirée et une bonne partie de la nuit, car en vacances, les Egyptiens laissent encore plus libre cours à leur tendance de lève et couche-tard. Cela m’étonne toujours de voir les petites familles déambuler et faire du shopping tout naturellement avec les petits…à 1h30 du matin. La journée, les plages sont elles aussi envahies tout le long de la corniche par une foule aussi dense dans l’eau que sur le sable et par une forêt de parasols, sponsorisés Coca-Cola ou cette année aux couleurs vertes d’« Etisalat », le nouveau opérateur de téléphonie mobile qui vient d’arriver sur le marché égyptien… Quant aux chauffeurs de taxi, ils sont plus irritables (ce qui se comprend dans une certaine mesure vu les embouteillages qu’ils doivent subir à cette saison), mais aussi plus chers et sacrément capricieux, et il faut alors attendre patiemment pour en trouver un ; premièrement, libre, deuxièmement qui accepte de vous prendre pour la destination annoncée...

Dans cette ambiance, la population semble effectivement avoir doublé (je n’ose imaginer qu’on puisse alors approcher des 8 millions ?) et pour les Alexandrins c’est toujours aussi étonnant de devoir subir cette transformation estivale tant la calme Alexandrie est vide en hiver, spécialement ces nuits de mauvais temps où nous semblons seuls nous aventurer à braver le vent pour le caprice de quelques bières…

11/07/2007

Le poil

Le poil, « l’ennemi public, celui qu’on torture au rasoir bic » chante Java…
En Egypte, le poil est également un ennemi public, surtout le poil qui s’aventure à pousser sur une quelconque partie du corps féminin (ils sont en revanche tout à fait respectés s’ils croissent et s’épanouissent sur le torse viril d’un Egyptien mâle). Ainsi le poil de la femme égyptienne est traqué, repéré et impitoyablement épilé par des professionnelles assidues qui utilisent les méthodes traditionnelles –mais qui ont fait leur preuve – de la cire à base de sucre et du fil. Le fil est utilisé sur le visage (moustache, sourcils, duvet) grâce à une technique assez impressionnante qui transforme n’importe quel fil de couture, enroulé et coincé entre les doigts et les dents de l’épileuse en un outil diablement efficace pour enserrer les poils du plus fin duvet et les arracher. Vous me direz, il n’est pas très bon non plus d’être poil en Europe, surtout en cette période estivale et à l’époque de la mode des torses d’éphèbes imberbes. Sauf qu’en Egypte, la femme se doit d’être véritablement sans poil et surtout avant de se marier, la jeune fiancée doit passer impérativement par l’épilation intégrale, y compris le pubis. Mais c’est également les jambes entières, les bras entiers, et même le dos ou toute autre partie velue qui y passe. Question d’hygiène paraît-il, moi je dirais plutôt de culture car je ne vois pas pourquoi cela serait moins hygiénique pour la femme que pour les hommes qui eux peuvent garder tous leurs poils.

La partie visible de cette pratique culturelle est l’avant-bras, la partie du corps la plus souvent découverte, encore que la proportion de filles voilées fait que cela n’est pas si fréquent. Au début, quand une amie ou une épileuse me posait innocemment la question de savoir pourquoi je ne m’épilais pas les bras, je m’offusquais, je me sentais sûre de mon bon droit, sûre de ma culture, pensant que c’est une idée vraiment stupide de s’épiler les avant-bras alors qu’ils sont plutôt fins et clairs. J’allais sûrement pas commencer pour leur faire plaisir, surtout que ça allait repousser plus foncé et que cela serait une entreprise complètement inutile étant donné que de retour en France je n’allais pas continuer.

Entre temps, je me suis habituée à la vue d’avant-bras mats et lisses (pour les rares qui sont donnés à voir), et mon acculturation aidant, je trouve cela de plus en plus séduisant...
Aujourd’hui quand un regard s’attarde sur mon avant-bras velu, je me sens gênée, et m’évertue à lui ôter de la vue ces poils réfractaires pour ne pas lire dans le regard du curieux une idée comme « beurk, ces occidentales, elles sont poilues et elles ne s’épilent pas », ou le même genre de stéréotype que nous nous pouvons avoir sur les allemandes ou les portugaises. Et quand on me demande pourquoi je m’épile les jambes et pas les avant-bras, je réponds évasive que c’est une question de culture, sans être très convaincue moi-même. L’idée a en effet commencé à s’insinuer insidieusement dans mon esprit que c’est effectivement étrange de s’épiler les jambes et pas les bras, et que finalement des bras sans poils et bien cela est assez esthétique. Pour l’instant je résiste, d’autant que le soleil de l’été les rend de plus en plus clairs mais je ne sais pour combien de temps. Quand vous me verrez avec les avant-bras épilés, cela sera le signe incontestable que je serai vraiment intégrée…