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26/11/2006

Rêve Alexandrin (extrait)

Par Nour

Cheikh Ali, une taverne, seul terme qui peut exprimer la rareté d’un lieu de ce genre dans une ville islamisante en pénurie de boissons alcoolisées. Entre des plantes bien disposées à masquer l’entrée qui faisait face à un long bâtiment en pierre où je me suis dissimulée, une nuit, pour donner un baiser ou réprimander un amant oublieux. Le Cheikh Ali, dont la pénombre réchauffée par une lumière pâle, faisait songer à l’ambiance qui pouvait régner à l’époque de la prohibition. La vétusté du lieu, capharnaüm d’objets que le temps a décidé de négliger, avec son horloge arrêtée et remontant à l’âge européen de la ville d’Alexandrie, ses photos cadrées des personnages de l’époque, son papier peint vert et son zinc en or, donnait au lieu un aspect aristocratique et funèbre. Un curieux personnage, joueur de luth aux yeux asiatique égayait l’assistance, majoritairement masculine et louche, en leur déclinant des vieilles mélodies d’un soprano égyptien décédé. C’est ici qu’on venait céder à nos humeurs, oublier pour un temps nos différences, remettre en cause l’état des administrations et des gens du pouvoir. On pouvait y recroiser les visages oubliés de la vieille Alexandrie ou discuter avec des artistes, des administrateurs ou des expatriés jeunes ou vieux, vivant ou de retour sur une terre qu’ils n’ont pu oublier. La dépravation de l’alcool et du charme de la nuit unissaient les bassesses, les orgueils et les flatteries dans une eurythmie légère reposant sur une reconstitution personnelle d’un monde fascinant et étranger. La ville mythique d’Alexandrie et ses habitants.

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